L’événement :
Il y a 100 ans, le 3 mai 1909, Diaghilev fondateur des ballets russes arrivait à Paris gare de Lyon.
Le théâtre du Chatelet est entièrement rénové et réaménagé pour les premières représentations du ballet russe.
Serge Diaghilev, créateur de la troupe a bien préparé son entrée, quelques semaines au paravent il a invité quelques personnalités du monde artistique, des journalistes, aux répétitions,Jean Cocteau, la princesse Anna de Noailles, les critiques en vue, sont venus. Quelques peintres à la mode avaient fait le portrait de Nijinski. Diaghilev ayant le sens de la publicité avait fait placarder sur toutes les colonnes Morris de Paris l’affiche d’Anna Pavlova. Diaghilev invité dans tous les salons et soupers parisiens, fit quelques confidences sur un autre nom, le danseur Nijinski.
Paris est en effervescence, le 19 mai 1909, le théâtre du châtelet affiche complet, le tout Paris est présent, ce fut un choc artistique, le public fut bouleversé par la nouveauté, le talent des artistes, la somptuosité des décors. Nijinski est à l’honneur.
Sergei Pavlovitch Diaghilev nait en 1872 à Selichtchi proche de Novgorod, dans une famille aisée de la petite noblesse, c’est la fin de l’époque tsariste. Il étudie le droit à l’université de Saint-Pétersbourg, ainsi que le chant et la musique au conservatoire.
En 1892, il obtient un diplôme de musicologie, élève de Rimski-Korsakov qui lui dit qu’il n’est pas fait pour cet art, découragé il abandonne.
Il se lie avec Alexandre Benois artiste peintre, décorateur, scénographe et historien d’art russe, Konstantin Somov, peintre symboliste, Dmitri Filosofov, écrivain et critique littéraire russe, Léon Bakst, peintre décorateur et créateur de costumes russes. Mais il est très difficile d’intégrer le cercle fauviste des artistes, Diaghilev se perfectionne sur l’histoire de l’art russe et occidentale aidé par son ami Alexandre Benois, il voyage pendant deux ans pour se perfectionner, il devient le plus apprécié du groupe pour ses connaissances.
Avec l’aide financière de la princesse Maria Tenicheva (mécène, collectionneuse d’œuvres d’art, elle-même artiste) et de Savva Mamontov, (industriel, et mécène russe, à l’origine de l’opéra russe privé, il a financé un nombre de pièces de compositeurs, Tchaïkovski, Rimski-Korsakov, Borodine, Moussorgski). Diaghilev créé le journal Mir Iskousstva (le monde des arts), et fonde avec son cousin Philosophoff et Alexandre Benois une groupe avant-gardiste.
Dès 1899, il est nommé assistant particulier du prince Serge Volkonsky, qui a pris la direction des théâtres impériaux.
1900 il est responsable de l’annuel des théâtres impériaux, de ce fait propose des postes à ses amis.
Léon Bakst s’occupe des costumes du ballet français « le cœur de la marquise 1902 » chorégraphie de Marius Petipa, Alexandre Benois, produit « la vengeance de Cupidon » opéra de Taneiev.
Fin XIX eme siècle, il y a plus de liberté dans la manière d’appréhender la tonalité, le rythme les harmonies. Diaghilev est un des premiers à adopter ce style de musique.
1900-1901, Volonsky demande à Diaghilev de monter Sylvia, ballet de Léo Delibes, mais Diaghilev refuse d’éditer l’annuel des théâtres impériaux, en raison de divergences d’opinion. Etant en conflit avec le théâtre, il fonde les ballets russes nous sommes en 1907, de ce fait il devient organisateur de spectacles, critique d’art, protecteur des artistes, impresario de ballet.
De grands danseurs et chorégraphes seront issus de cette compagnie et ont marqués le XX eme siècle.
Ses amis l’aident à monter des expositions.1905, il expose à Saint Pétersbourg, il s’agit de portraits peints par des artistes russes, l’année suivante en 1906, cette exposition vient à Paris au Petit Palais.
Diaghilev se sépare du ballet impérial en 1911, il fait de sa compagnie une troupe privée composée des meilleurs éléments du théâtre Mariinski. Cette troupe va se fixer à Paris, Londres, Monte-Carlo.
Pendant ces années, Diaghilev va programmer différentes compositions de Rimski-Korsakov, et passe commande auprès des compositeurs renommés pour ses musiques de ballets.
L’histoire des ballets russes, de 1909 à 1929, ces ballets vont représenter toutes les formes artistiques, donnant lieu à un spectacle. Diaghilev a apporté différents styles à ses ballets, inspirés par les contes russes, l’art moderne, le futurisme.
Ils auront trois périodes :
Les premières années jusqu’en 1912, les thèmes des ballets sont inspirés par le folklore russe et oriental, la chorégraphie de Michel Fokine (issu de l’école impériale de ballet de saint Pétersbourg), les danseurs formés selon la tradition académique et romantique, (héritage du style français et italien), ajoutant à des qualités spécifiques leur sensibilité russe.
1912, deux créations : Daphnis et Chloé la musique composée par Maurice Ravel, L’après-midi d’un faune par Claude Debussy.
De 1912 à 1921, grande diversité dans les chorégraphies, originalité et recherches expérimentales. Diaghilev a fait travailler des artistes occidentaux ce qui donné lieu à de nombreuses créations.
Manuel de Falla, musicien espagnol, des peintres pour les décors, Picasso, Derain, Matisse, Braque. Nijinski, Massine, Fokine ont réalisés les chorégraphies.
Jeux en 1913, musique Debussy, le sacre du printemps en 1913, musique de Stravinski, Joseph-légende 1914, musique de Strauss, Parade 1917, musique Satie, le tricorne 1917, musique Manuel de Falla, la boutique fantasque 1918, musique Respighi.
Après une rupture pendant la guerre, des peintres d’avant-garde sont venus rejoindre la troupe, il s’agit de Michel Larionov et Nathalie Gontcharova, ils sont de la veine des modernistes. La reprise des tournées s’effectue à partir de 1917. En 1931, le chorégraphe Léonide Massine quitte la troupe, c’est la fin de la seconde partie des ballets russes.
De 1921 à 1929, les ballets russes ont répondu au contexte des années folles, c’était inédit.
C’est aussi l’arrivée de nouveaux chorégraphes Bronislava Nijinska et Georges Balanchine, des peintres surréalistes, Naum Gabo, Antoine Pevsner, vont apporter aux ballets des tendances artistiques nouvelles. Diaghilev a fait participer des musiciens du groupe des six (le groupe des six : Darius Milhaud, Georges Auric, Arthur Honegger, Germaine Tailleferre, Francis Poulenc, Louis Durey). Boris Kochno a été le Secrétaire de Diaghilev et a créé des livrets et supervisé les spectacles. De nouvelles créations :
Les biches 1923, musique Poulenc, le fils prodigue 1929, mais le plus célèbre restera Igor Stravinski a qui Diaghilev a demandé d’adapter des pièces de Chopin pour les Sylphides.
Tant par leur style chorégraphique que par les thèmes abordés, ces ballets ont étés présentés à Paris dans différentes salles, théâtre Sarah Bernhardt, Chatelet, Théâtre des Champs Elysées, Opéra. De nombreux spectateurs sont venus les admirer.
Les ballets russes ont attiré des artistes ayant le désir de connaître les dernières innovations artistiques. Acteurs, peintres, musiciens, écrivains. Parmi les écrivains, Jean Cocteau, Marcel Proust et Romain Rolland, parmi les acteurs, Sarah Bernhardt. Jacques-Emile Blanche, Valentine Gross, le peintre Auguste Renoir et le sculpteur Auguste Rodin.
Au public d’artistes s’est ajouté un public mondain, composé d’aristocrates, de ministres et de diplomates. Pour cette élite, les Ballets Russes ont été garants d’une caution culturelle et mondaine. Le public était composé de journalistes et de critiques d’art. La presse s’est ainsi fait le relais du succès des spectacles.
Les ballets :
A travers les thèmes présentés, les décors et la musique, les spectacles de Diaghilev ont mis en scène une Russie de légende.
Le Festin (1909) a présenté plusieurs danses traditionnelles slaves, comme la mazurka. Musique Moussorgski.
Le livret de L’Oiseau de Feu(1910) a été tiré de plusieurs contes russes, dont ceux d’Afanasiev. Musique Stravinski.
Shéhérazade créé en 1910, a émerveillé le public par sa mise en scène, atmosphère sortis des contes orientaux, les décors composés de tapis, coussins, dans des tons rouge, vert, les costumes richement brodés. Cela donnait l’impression d’un intérieur de harem.
Petrouchka (1911) a mis en scène la vie et les mœurs du peuple russe, à travers des marionnettes évoluant dans le décor de la foire du carnaval de Saint-Pétersbourg. Musique Stravinski.
Pour les décors et les costumes du Coq d’Or(1914), Nathalie Gontcharova s’était inspirée de l’imagerie russe et de jouets en bois artisanaux. Musique Rimski-Korsakov
C’est surtout pendant les premières années que les thèmes sont puisés dans le folklore. Mais d’autres ballets ultérieurs ont eux aussi valorisé la Russie traditionnelle.
Chout (1921), tiré d’une légende russe, musique de Prokofiev .Noces (1923), créé à partir de poèmes populaires authentiques. Musique de Stravinski
1921, il monte la belle au bois dormant avec la ballerine Olga Spessivtseva.
Les danseurs russes, auxquels on doit le caractère unique des ballets, sont devenus de véritables mythes vivants pour les français. Leur renommée en Russie les avait fait connaître auprès d’une partie du public avant 1909, Tamara Karsavina, Anna Pavlova, Ida Rubinstein, Vaslav Nijinski et Adolphe Bolm, ont impressionnés les spectateurs par leur virtuosité technique ; Nijinski a été admiré pour son élasticité et pour la hauteur de ses sauts.
Anna Pavlova
Les décorateurs, Bakst, Benois, Korovine et Roerich, ont émerveillés le public par la diversité et la fantaisie colorée des décors et des costumes.
Ci-dessous décor de l'oiseau de feu
Les peintres Nathalie Gontcharova, était à l’exposition de l’art russe organisée par Diaghilev à Paris en 1906, elle fait les décors pour le ballet le coq d’or en 1914. Dès 1917 elle accompagne la troupe de Diaghilev qui effectue une tournée en France, Espagne, Italie et s’installe à Paris en 1918 avec son compagnon Michel Liaronov. Dans les années 20 elle est un des principaux peintres des ballets russes, elle fera aussi le décor du ballet Noces.
Michel Liaronov artiste peintre passa de l’impressionnisme au fauvisme, il est l’un des premiers animateurs de l’avant-garde en Russie et fera de nombreux décors pour les ballets russes.
Naum Gabo, Antoine Pevsner sont frères, peintres surréalistes, dès 1920 Naum a utilisé métal et plastiques pour atteindre la transparence et faire interférer les structures dans l'espace.
Les compositeurs ont eux aussi été l’objet d’éloges, surtout Stravinski.
Ainsi, l’image de la Russie à travers les Ballets a été celle d’un pays qui savait mettre ses traditions en valeur. La qualité des spectacles, leur atmosphère ont ému un public en quête d’évasion.
Cet exotisme a été perçu comme l’échappatoire à la réalité, aux angoisses de la vie quotidienne, dans un contexte international tendu. Les ballets russes ont présenté des régions géographiquement lointaines comme l’Extrême-Orient ou la Grèce antique. Ainsi les spectateurs européens ont étés confrontés à l’image de leur culture, vue par les russes. Quelques exemples Pulcinella pour l’Italie en 1920, Quadro flamenco pour l’Espagne en 1920 et les facheux pour la France en 1924.
Foyer de création artistique, les ballets russes ont suscités un grand intérêt dans les milieux littéraires, aristocratiques et artistiques de l’époque.
Cocteau ami de Diaghilev depuis 1909 a joué un rôle dans la création de plusieurs ballets, le dieu bleu 1912, Parade 1917, le train bleu 1924, il en a écrit le livret. Il a aussi participé à l’élaboration des textes de certains programmes, il a rédigé " portraits et souvenirs des ballets russes ".
Guillaume Apollinaire a ainsi pris la défense des Ballets devant la controverse suscitée par "Parade". Dans son article "Parade ou l’esprit nouveau" 1917, publié dans le programme, il a montré les qualités du ballet, qui participait selon lui de l’élan vital donnant naissance à un art nouveau.
André Gide, a écrit pour "La Nouvelle Revue Française" un article intitulé "Les représentations russes au Châtelet", où il se montrait à la fois réservé et enthousiaste, et où il évoquait l’imaginaire des étendues désertiques évoquées par "Le Prince Igor" en 1909.
Marcel Proust, grand admirateur des Ballets Russes, a trouvé dans ces derniers une source d’inspiration. D’autres écrivains, Sacha Guitry, Paul Claudel ont aussi diffusés leurs écrits. Paul Valéry a écrit un poème "l’âme et la danse".
Des éloges faites par des personnalités mondaines parisiennes, Misia Sert, la comtesse de Greffulhe, la princesse Edmonde de Polignac et Robert de Montesquiou, esthète et figure mondaine par excellence.
L’impact des ballets russes :
Ils ont inspirés les peintres fauvistes et la naissance du style art déco, Mêlant danse, musique, et peinture, inspirés des Mille et Une Nuits, ils sont une invitation au luxe et à l'exotisme. D’où la mode des éventails, des plumes, des jets d’eau, des couleurs vives. Les couleurs insolites vont s’imposer dans le décor du mobilier : on verra des boudoirs aux murs orangés, des salons tendus de noir.
Écrivains, mondains et mécènes, par leur intérêt pour les ballets russes et les éloges qu’ils en ont fait autour d’eux, se sont constitués en vecteurs de l’imaginaire auprès du public. Le choc culturel constitué par ces ballets n’a pas seulement investi les milieux littéraires, mais aussi imprégné l’art français de l’époque.
Les photographies et les arts plastiques ont permis aux lecteurs de fixer sur des visages l’imaginaire suscité par les textes. Les artistes ont fait la une de la presse de l’époque, une photographie de Vaslav Nijinski et d’Anna Pavlova dans Le Pavillon d’Armide. La revue contenait également des photographies de Nijinski, prises en Russie. Nijinski a été le danseur des Ballets le plus photographié, en particulier par Auguste Bert et Eugène Druet.
Les peintres, dessinateurs, sculpteurs, se sont servis des photographies comme supports pour leurs travaux, en y puisant des informations sur la plastique des danseurs. Professionnels et amateurs ont voulu fixer sur la toile l’évanescence de la danse. Trois peintres se sont particulièrement distingués dans cette traduction picturale de l’art des Ballets Russes, Valentine Gross, Jacques-Emile Blanche et Jules Flandrin. Les spectacles de Diaghilev ont également inspiré de nombreux dessinateurs, dont les croquis ont paru dans la presse, le sculpteur, Auguste Rodin, a réalisé une sculpture en bronze de Nijinski, intitulée " Danseur, dit Nijinsky " en 1912.
la mode et les arts décoratifs aussi touchés par ce choc culturel.
Léon Bakst, en particulier, a été l’inspirateur de nouvelles modes vestimentaires et décoratives. Il a développé et confirmé à Paris l’attrait pour les vêtements de style oriental, inspirant des maisons de couture Worth, Paquin, la population féminine aisée s’est tournée vers ces grands couturiers de l’époque. Paul Poiret à réaliser des turbans lamés dans le style de L’Oiseau de Feu, des robes incrustées de pierres précieuses et des fourrures, inspirées des costumes de Shéhérazade et du Prince Igor. Les costumes les plus répandus ont été le pantalon de harem création de 1910, les robes garnies de petits cerceaux, les jupes-sultanes, les tuniques et les capes frangées
Dans les années vingt, Coco Chanel, à son tour, fascinée par les ballets russes a transcrit dans la mode son goût pour les motifs slaves, elle s’est inspirée du folklore pour créer des vêtements avec ces motifs .
L’attrait pour une mode à motifs slaves s’est répercuté sur les styles de coiffure, les accessoires de mode et les bijoux...
Les arts décoratifs se sont nourris aussi de l’esthétique des ballets russes, dont l’influence a été perceptible dans la rue, vitrines des grands magasins, des restaurants, des spectacles ont également influé sur l’aménagement des intérieurs parisiens. Les meubles de style oriental, les tapis aux couleurs chatoyantes, les coussins, les papiers peints ont été très prisés par la bourgeoisie, qui aspirait à mettre une touche d’exotisme dans sa vie quotidienne.
Diaghilev a provoqué avec ses spectacles un choc culturel et artistique auprès du public français.
Sa réussite a attirée de nombreux mécènes, dont l’aide matérielle était vitale.
Des concepts artistiques nouveaux
Les innovations apportées par les musiciens, les décorateurs et les chorégraphes russes ont bouleversé la sensibilité artistique de l’époque.
Igor Stravinski notamment a révolutionné l’orchestration, en composant pour Le Sacre du Printemps une musique aux dissonances très dures et aux rythmes asymétriques, ainsi il a influencé les musiciens français, en particulier le « Groupe des Six.
La décoration théâtrale s’est vue modifiée, les décors des ballets ont apportés de nouvelles tendances, l’emploi de tons vifs, cela a servi de modèle aux décorateurs de théâtres français. Ainsi les décors ont joué un rôle important dans la conception globale du spectacle, et le ballet a désormais été conçu comme un tableau animé. Beaucoup d’artistes, de décorateurs et de metteurs en scène se sont inspirés de l’esthétique des décorateurs russes et de leurs méthodes. Apport d’ une nouvelle sensibilité théâtrale.
Au début du siècle, l’art chorégraphique était sous l’emprise des conventions et du formalisme. Les ballets russes ont fait reconnaître l’autonomie créatrice du chorégraphe, l’expressivité du danseur, et le rôle actif joué par le corps de ballet. Les danseurs masculins ont désormais été admirés, ce qui est nouveau.Grâce à Nijinski, les sentiments ont été exprimés par des gestes et des pas naturels, qui ont permis de rehausser la beauté sculpturale du corps. Les chorégraphes furent influencés.
Les années d’après-guerre ont été particulièrement propices à l’expression de tous les talents créatifs. Du vivant des ballets russes, d’autres troupes de danseurs ont tenté d’atteindre leur aura. Après 1929, certains artistes se sont déclarés héritiers de la compagnie et ont créé leurs propres troupes. Anna Pavlova (1911-1929). Ida Rubinstein, a présenté sa troupe 1914 à 1935 sur les scènes du monde entier, elle a travaillé avec Gide et Valéry. D’autres troupes se sont construites sur ce modèle, mais aucune compagnie n’a eue leur succès. Même les Ballets Suédois de Rolf de Mare (1920-1924) avaient une certaine filiation, dans leur forme, avec la troupe russe.
Après 1929, Serge Lifar et Boris Kochno ont tenté de faire survivre la Compagnie des ballets russes, mais sans succès, les intérêts personnels ayant pris le dessus.
Plusieurs compagnies ont été créées dans les années trente sur le modèle structurel des ballets russes, mais aucune n’a su aussi longtemps qu’eux capter l’attention du public. Celle de Bronislava Nijinska a cherché avant tout à mettre en valeur l’art du mouvement. La compagnie la plus proche des Ballets de Diaghilev a été créée en 1932 par René Blum et Wassili de Basil, qui l’ont intitulée " compagnie des Ballets russes de Monte-Carlo " (1932-1936). En 1936, elle a connu une scission, et Blum a alors fondé la seconde "Compagnie des Ballets Russes de Monte-Carlo". Les ballets russes du Colonel de Basil, fondés en 1934, ont été connus par la suite sous le nom "d’Original Ballet Russe ". En 1947, quelques-uns uns de ces ballets ont été présentés à Paris
Quant au répertoire, il a partiellement survécu, malgré le remaniement de certains spectacles. Les Sylphides, Pétrouchka, Le Spectre de la Rose et L’Après-midi d’un Faune ont été repris par diverses troupes. C’est principalement la version originale de ce ballet de Nijinski qui a été reprise pendant plus de cinquante ans. En outre, Balanchine avait conservé à son répertoire Apollon Musagète et Le Fils Prodigue. Noces, Les Biches, Le Train Bleu ont été représentés ces dernières années.
Après avoir participé à l’explosion moderniste et révélatrice de la Belle Epoque, considérablement enrichi l’histoire artistique des Années Folles, les ballets russes sont une synthèse des arts au service de la danse, ils ont fusionné les décors avec la mise en scène, générant un spectacle total .
Diaghilev a maintenu une tradition russe tout en mettant en scène des modes avant-gardistes. Ses ballets ont constitué une nouvelle référence sur le plan artistique, dans la manière d’exprimer des idées, des sentiments et de considérer l’œuvre d’art.
Le choc artistique et culturel produits par les spectacles ont été à l’origine de la prise de conscience française d’une identité culturelle russe.
Quelques réactions
Certains ballets ont donné lieu à des polémiques, dont la presse s’est fait l’écho. La première représentation de L’Après-Midi d’un Faune le 29 mai 1912, a suscité des réactions très violentes.
Le Sacre du Printemps, en 1913, a provoqué un scandale encore plus important, une partie du public ayant conspué la musique d’avant-garde de Stravinski. Les hurlements, les injures et les sifflements dans la salle ont été si intenses que les danseurs eux-mêmes n’entendaient plus la musique.
Dans Parade en 1917, le décor de Picasso composé de personnages insolites et la référence au cubisme ont également déconcerté le public.
Le ballet Romeo et Juliette, en 1926, a révolté les surréalistes, qui ont taxé l’entreprise de Diaghilev de " capitaliste " . Les Ballets de Diaghilev ont présenté un style jugé trop novateur par certains. De fait, leur esthétique nouvelle a consacré une forme d’art inédite.
Les ballets russes peuvent en effet être qualifiés de révolutionnaires, en ce qu’ils ont durablement influé sur la musique et les arts du spectacle français de l’époque.
Le danseur Serge Lifar a résumé en quelques mots la portée des créations de celui-ci :
"Serge de Diaghilev, ce noble et ardent Chevalier de la plus grande croisade des Arts du XXe siècle, qui, par son génie, devait réaliser cette union féconde entre toutes les valeurs spirituelles et artistiques, entre l’Orient et l’Occident, et ainsi accomplir la renaissance de l’art dans le monde. La Capitale de l’Art a immortalisé ce grand Magicien".
Diaghilev a rendu au ballet sa valeur d’art universel. Son œuvre a permis d’augmenter l’intérêt pour la danse et pour les études dans le domaine artistique.
Le ballet n’a pas survécu au décès de son créateur en 1929.
Plusieurs membres des ballets russes sont devenus des références de l’art chorégraphique. George Balanchine aux USA, Serge Lifar en France, Ninette de Valois et Marie Rambert en Angleterre.
Extraits de "Diaghilev et les ballets russes"
Une exposition sur les Ballets Russes à l'opéra Garnier à Paris depuis le 24 novembre.
Un programme de ballets russes est présenté du 12 au 31 décembre 2009 à l'opéra Garnier.